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La « Loi Travail », quels changements pour la VAE ?

Entre conflits socio-politiques et recours au désormais très célèbre Article 49.3, la « Loi Travail » ou « Loi El Khomri » a été promulguée en Août 2016. Elle est maintenant connue sous le nom de « LOI n° 2016-1088 du 8 août 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels ». Aux dernières nouvelles, un décret d’application devrait venir la compléter en ce qui concerne la VAE. D’ores et déjà, nous lançons un appel – amical – à tous les acteurs du monde de la VAE pour une application effective des nouvelles dispositions relatives au dispositif. Ainsi, des milliers de personnes (salariés, demandeurs d’emploi, décrocheurs scolaires, …) pourront transformer leurs expériences en diplômes. Et, dans le cadre d’une incontournable action collective, la VAE pourra pleinement jouer le rôle sociétal qui est fondamentalement le sien.

Dans cet article, nous revenons sur ces nouvelles dispositions et alors les principaux changements que la « Loi Travail » implique pour la VAE.

Les principaux changements

• La durée d’activité : de 3 ans à 1 an

Pour qu’une demande de validation soit recevable, la durée d’activité requise était de 3 ans et ce, que l’activité ait été exercée de façon continue ou non.

Ce qui change avec la « Loi Travail » : La durée d’activité passe de 3 ans à 1 an et ce, « que l’activité ait été exercée de façon continue ou non ». Aussi et pour tout candidat, elle prend maintenant en compte les périodes de formation initiale ou continue en milieu professionnel. En fait, ces périodes n’étaient comptabilisées que pour les personnes n’ayant pas atteint le niveau V [1] de qualification pour la préparation d’un diplôme ou d’un titre.

Notre avis : cette baisse est pertinente. Elle l’est encore plus si nous considérons que la durée d’activité « en rapport avec la certification visée ne représente pas une condition systématique de réussite d’un parcours VAE, notamment pour des certifications de premier niveau » [2]. Devant notamment permettre à des personnes peu ou pas qualifiées de bénéficier de la validation des acquis de l’expérience, cette évolution législative pourrait toutefois desservir le dispositif auprès d’employeurs et de certificateurs. Les certifications, titres ou diplômes obtenus pourraient perdre de la valeur aux yeux des premiers. Et parmi les seconds, certains pourraient encore plus décrier la VAE qui dévaloriserait selon eux les diplômes qu’ils délivrent. Une telle évolution pourrait aussi être un nouvel argument pour les détracteurs du dispositif qui le dénonceraient avec plus de vigueur mais particulièrement à tort. En effet, le jury – qui est paritaire – reste souverain malgré la « Loi Travail ». Au-delà, une autre conséquence négative de la baisse de la durée d’activité pourrait être la hausse des taux de validations partielles et nulles. Deux raisons pourraient expliquer une telle hausse. Premièrement, avec la « Loi Travail », le recours à la VAE devrait considérablement augmenter. Le potentiel de son marché – mais dans la continuité de la Loi du 5 Mars 2014 – devrait attirer de nouveaux acteurs ayant peu d’expérience en matière d’accompagnement. Deuxièmement, il y a l’effet pervers de la baisse de la durée d’activité. En fait, cette baisse pose la question de la consistance de l’expérience à transformer en diplôme. Une telle expérience, n’est-elle pas fondée sur la durée d’activité ? Il convient d’observer de très près l’effet de cette disposition dans le cadre d’une étude portant sur la corrélation entre « durée d’activité » et « résultat du parcours VAE » de candidats.

Face aux futurs candidats à la VAE ayant une durée d’activité d’un an, le risque de validations partielles et nulles apparait à priori plus important. Les accompagnateurs doivent, pour le neutraliser sinon le minimiser, l’intégrer comme un nouveau paramètre ; l’objectif étant de sécuriser au mieux le parcours de VAE à travers par exemple des diagnostics plus approfondis, une offre de formation adéquate et pouvant alors compléter l’expérience du candidat. Il sera sans doute pertinent d’associer Formation et VAE. Toutefois, il faudra veiller à ce que l’on ne commercialise pas des heures de formation qui ne s’imposent pas. En effet, si la formation permet d’entrer dans une logique de parcours qui nous semble très bien, des acteurs pourraient être tentés de commercialiser des heures ne s’imposant pas mais ayant pourtant leurs coûts.

• La reconnaissance de parties de certification constituant un bloc de compétences 

Dans le cadre d’une validation partielle, il se pose la question de la durée de validité des parties de certification obtenues (ou unités acquises) au cas où le candidat souhaiterait plus tard valider totalement les acquis de son expérience. Concernant l’enseignement supérieur, la loi ne fixe aucun délai et ces unités sont dès lors acquises à vie. Selon le dispositif en vigueur, les unités sont acquises – sauf pour l’enseignement supérieur – pour 5 ans à compter de la notification de la décision du jury.

Ce qui change avec la « Loi Travail » : la limite de validité de 5 ans est levée et les parties de certifications obtenues sont définitivement acquises. Ces parties permettent maintenant des dispenses d’épreuve et ce, « si le règlement fixé par l’autorité administrative, l’établissement ou l’organisme qui délivre la certification prévoit des équivalences totales ou partielles ». Il est donc question de blocs de compétences ou « éléments identifiés d’une certification professionnelle s’entendant comme un ensemble homogène et cohérent de compétences » [3]. Grâce à la « Loi Travail », un candidat peut avancer « module » par « module », au rythme de la singularité de ses réalités, sans la pression du temps. Les certificateurs vont donc devoir adapter leurs règlements ou textes règlementaires. Au-delà de ces impacts juridiques, la « Loi Travail » est porteuse d’impacts administratifs pour les organismes certificateurs. Ces derniers doivent « faire évoluer progressivement leur base de données à la fois pour assurer le suivi des parcours prévu par la loi du 5 mars 2014 et intégrer le dynamisme des parcours non plus lié à une seule certification mais aux diverses possibilités de validations partielles, passerelles entre certification et diversité des modalités d’accès à la certification » [4].

Notre avis : Il est temps pour de nombreux certificateurs d’adapter leurs référentiels en termes de blocs de compétences. A ce sujet, la tentation d’une division des diplômes en de nombreux blocs ne peut être que forte. En effet, c’est là l’occasion de bénéficier d’une offre de formation courte « CPFisable ». La CNCP (Commission Nationale de la Certification Professionnelle), les OPCA (Organisme Paritaire Collecteur Agréé) et OPACIF (Organisme Paritaire Agréé au titre du Congé Individuel de Formation) doivent être les gardiens du temple à ce niveau. Cependant, quel est le bon nombre de blocs de compétences adéquat pour chaque diplôme ? La réflexion sur ce sujet devrait suivre la seule logique pédagogique devant fournir une organisation lisible, modulaire et cohérente des diplômes.

• L’entretien professionnel 

Quand une entreprise embauche un salarié, elle doit l’informer sur son droit à un entretien professionnel tous les 2 ans. Durant un tel entretien, l’employeur doit aborder avec celui-ci ses perspectives d’évolution professionnelle en termes particulièrement de qualifications et d’emploi.

Ce qui change avec la « Loi Travail » : l’entretien professionnel comporte maintenant des informations relatives à la VAE. Il s’agit de promouvoir le dispositif dans l’entreprise. Et la « Loi Travail » précise que des modalités de cette promotion peuvent être déterminées par un accord d’entreprise dans les entreprises de plus de cinquante salariés.

Notre avis : La VAE est un « produit « qui ne trouve pas son public » » [5] et manque alors de notoriété. L’obligation d’informer le salarié sur la VAE à l’occasion de son entretien professionnel va sans doute contribuer à la promotion du dispositif qui reste assez méconnu dans de trop nombreuses entreprises où de trop nombreux bénéficiaires potentiels n’en savent pas grand-chose sinon rien. Cette obligation est à même de créer des rencontres décisives avec la VAE.

Le congé pour VAE 

Le salarié qui s’engage dans une démarche de VAE peut bénéficier d’un congé pour VAE dont la durée ne peut excéder 24 heures de temps de travail, consécutives ou non, par validation. La Loi du 5 Mars 2014 stipule qu’une personne ayant été titulaire de CDD peut bénéficier d’un tel congé qui est toutefois un droit « subordonné à des conditions d’ancienneté ». Les conditions de rémunération ne sont alors pas les mêmes pour un CDD et un CDI.

Ce qui change avec la « Loi Travail » : Les conditions d’ancienneté pour les titulaires de CDD sont supprimées et c’est l’article L.6422-8 qui prévoit maintenant les conditions de rémunération comme suit : « le salarié dont l’action de VAE est prise en charge par l’un des organismes collecteurs paritaires agréés a droit à une rémunération égale à la rémunération qu’il aurait reçue s’il était resté à son poste de travail, dans la limite par action de validation d’une durée déterminée par décret pour chaque action de validation. La rémunération due au bénéficiaire d’un congé pour VAE est versée par l’employeur. Celui-ci est remboursé par l’organisme collecteur paritaire agréé ». Aussi, le congé pour VAE n’est plus limité à 24 heures (de temps de travail, consécutives ou non, par validation) pour tous les candidats. La « Loi Travail » stipule, en effet, que « la durée de ce congé peut être augmentée par convention ou accord collectif de travail pour les salariés n’ayant pas atteint un niveau IV [6] de qualification, au sens du répertoire national des certifications professionnelles, ou dont l’emploi est menacé par les évolutions économiques ou technologiques ».

Notre avis : ces évolutions relatives au congé pour VAE sont à saluer. À travers elles, la « Loi Travail » remet les pendules à l’heure d’une certaine justice sociale pour les titulaires de CDD. Par exemple, dans le cadre de leurs congés pour VAE, les salariés – peu importe la nature de leurs contrats – jouissent maintenant des mêmes droits en termes de rémunération car ils sont soumis aux mêmes conditions en la matière.

• L’accompagnement à la VAE

La Loi du 5 Mars 2014 stipule notamment que « toute personne dont la candidature a été déclarée recevable […] peut bénéficier d’un accompagnement dans la préparation de son dossier et de son entretien avec le jury en vue de la VAE ».

Ce qui change avec la « Loi Travail » : Cette loi prévoit « un accompagnement renforcé pour certains publics peut être prévu et financé par un accord de branche. ».

Notre avis : cet alinéa complémentaire dans la « Loi Travail » n’est pas du tout anodin. En fait, il renvoie à une reconnaissance de l’importance de l’accompagnement et soutient la nécessité de son renforcement pour certains publics, l’objectif étant la sécurisation de leurs parcours de VAE. Toutefois, que faut-il entendre par « accompagnement renforcé », « certains publics » ou encore « financé » ?

Et pour conclure … la « Loi Travail » … 

• … entre impacts notables 

La « Loi Travail » va impacter de façon significative les acteurs du monde de la VAE. « Les accompagnateurs devront renforcer leurs activités d’ingénierie des certifications, proposer des diagnostics approfondis ; ces derniers devant particulièrement s’inscrire dans une logique d’aide à la construction de parcours. Cette loi sous-entend donc un nouveau défi pour le monde de l’accompagnement. Avec plus d’une décennie d’expertise, VAE Les 2 Rives en est conscient ; sa mission étant d’accompagner chaque candidat vers un nouveau départ fondé sur sa singularité, ses attentes », souligne David Rivoire. Cette loi va renforcer et donner un souffle nouveau à la VAE dont elle va assurer la promotion dans les entreprises, auprès des salariés. Le recours au dispositif devrait augmenter. Pour l’instant, « le nombre de certifications délivrées chaque année stagne en effet depuis de nombreuses années autour de 30 000, très en-deçà du besoin potentiel de reconnaissance des compétences acquises » [7]. Pourtant, les bénéficiaires potentiels de la VAE sont tellement plus nombreux !

• … et un grand regret

S’il y a bien un regret à souligner, c’est sans aucun doute l’absence d’une disposition permettant le financement de la phase de choix du diplôme et d’obtention de la recevabilité. Cette phase n’est pas encore reconnue comme une prestation éligible au financement de la formation professionnelle. Elle doit pourtant être inscrite dans « une véritable logique d’accompagnement » : « hormis l’information qui lui est apportée, l’accompagnement offre au candidat l’opportunité d’une vision claire et réaliste sur son projet, avec le ciblage du diplôme et du certificateur adéquats, ainsi que l’évaluation de ses chances de réussite, rendant le projet plus concret. Sa motivation et sa disponibilité sont également évaluées » [8]. Et la réalité peut en témoigner. En effet, de trop nombreux candidats – parmi ceux s’informant sur la validation des acquis de l’expérience – abandonnent durant cette phase dite de recevabilité du fait particulièrement d’un manque de prise en charge. Voilà donc un sujet qui mérite toute l’attention du législateur s’il veut bien sûr favoriser le recours à la VAE, baisser de façon considérable les abandons lors de cette première phase et permettre à de très nombreuses personnes de transformer leurs expériences en diplômes. La « Loi Travail » a donc raté une belle occasion d’aller plus loin en termes de financement de l’accompagnement à la VAE, une occasion de mieux faire en la matière. N’est-ce que partie remise ?

 

Abdoul Karim KOMI

Responsable R&D

VAE Les 2 Rives

 

[1] Des diplômes de niveau : Certificat d’Aptitude Professionnelle (CAP), Certificat d’Aptitude Professionnelles Agricole (CAPA), Brevet Professionnel Agricole (BPA), Brevet d’Etudes Professionnelles (BEP).

[2] Projet de « Loi Travail » (p.278)

[3] https://www.defi-metiers.fr/breves/le-copanef-definit-la-notion-de-bloc-de-competences

[4] Projet de « Loi Travail » (p.279)

[5] Mayen et Pin (2014, p.144)

[6] Des diplômes de ce niveau : Bac général/professionnel/technologique, Brevet des Métiers d’Art (BMA), Brevet Professionnel (BP), Brevet Technique des Métiers (BTM).

[7] Projet de « Loi Travail » (p.279)

[8] http://leblogdelavae.com/quel-perimetre-pour-laccompagnement-vae/

Références

  • http://leblogdelavae.com/
  • LOI n° 2014-288 du 5 mars 2014 relative à la formation professionnelle, à l’emploi et à la démocratie sociale
  • LOI n° 2016-1088 du 8 août 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels
  • Mayen, P. & Pin, J.-P. (2014). La rencontre avec la VAE. In : P. Lafont (Dir.), Institutionnalisation et Internationalisation des dispositifs de reconnaissance et de validation des acquis de l’expérience. Vecteur de renouvellement des relations entre univers de formation et de travail, Tome 1. (p. 143-156). Paris : E.U.I.
  • Projet de Loi visant à instituer de nouvelles libertés et de nouvelles protections pour les entreprises et les actifs (N°3600)

De la controversée « Loi Travail »…à un renforcement de la VAE !

De la controversée « Loi Travail » … à un renforcement de la VAE

 

 « Visant à instituer de nouvelles libertés et de nouvelles protections pour les entreprises et les actif-ve-s », la « Loi Travail » n’est certainement plus à présenter. Cela fait, en effet, quelques quatre mois [1] qu’elle monopolise vivement l’actualité, suscite des débats houleux et passionnés, divise des Français et des syndicats. Actuellement en discussion au Sénat, elle aura un impact notable sur la validation des acquis de l’expérience et ses acteurs. Qu’en est-il concrètement en termes de VAE à l’heure où le Sénat l’examine article par article ? Conscients que le texte de loi pourrait encore évoluer, nous vous proposons de décrire – dans les grandes lignes – les changements possibles et notables en nous fondant sur le projet de loi et le rapport fait au nom de la Commission des Affaires Sociales du Sénat.

L’ambition de la « Loi Travail » pour la VAE …

Dans « un monde où les actifs seront de plus en plus amenés à changer d’emploi au cours de leur carrière », le projet de loi reconnait la VAE comme « un moyen pour les travailleurs de faire reconnaître leurs compétences et leurs aptitudes et qui est de nature à favoriser les transitions professionnelles dans un monde » [2]. Le constat est alors dressé que  « les dispositions législatives actuelles manquent […] encore de cohérence et de clarté tant dans la nature des expériences à prendre en compte que dans le contenu des étapes du processus et sa mise en œuvre » [3]. Cette situation participe à la complexification du processus qu’il convient de clarifier, d’assouplir. La « Loi Travail » poursuit alors plusieurs objectifs : « la fluidité du processus, son adaptation aux réalités du marché de l’emploi et aux enjeux de mobilité professionnelle à moyen terme ainsi que la nécessité d’éviter toute interprétation non conforme à l’esprit des textes législatifs […] » [4]. Consacrant son article 34 à la VAE, elle ambitionne de la réformer afin de relancer son développement et d’en faciliter l’accès.  

Les principaux points susceptibles d’évoluer

  • La durée d’activité

Ce qui pourrait changer : La « Loi Travail » ramène la durée d’activité (continue ou non) requise – pour qu’une demande de validation soit recevable – de 3 ans à 1 an dans le but de permettre à des personnes peu ou pas qualifiées de bénéficier de la VAE. Il est alors considéré que cette durée « en rapport avec la certification visée ne représente pas une condition systématique de réussite d’un parcours VAE, notamment pour des certifications de premier niveau » [5]. Cependant, au Sénat, l’amendement 30 – qui a été adopté – ajoute une condition à cette disposition comme suit : l’activité doit avoir été exercée en continu ; c’est-à-dire sans interruption. Au-delà, la « Loi Travail » prévoit la prise en compte – dans la durée d’activité – des « périodes de formation initiale ou continue en milieu professionnel » [6] ; ces périodes étant obligatoires pour le CAP (Certificat d’Aptitude Professionnelle) et le baccalauréat professionnel par exemple. Cette disposition, autrefois réservée aux personnes n’ayant pas atteint le niveau V (BEP : Brevet d’Etude Professionnelle, CAP)[7], serait désormais applicable à tous les candidats VAE.

Notre avis : La réduction de la durée d’activité aurait sa pertinence mais ne serait pas sans effets pervers. Par exemple, elle pourrait impliquer la dévalorisation des certifications obtenues auprès des employeurs ; du côté des certificateurs, certains (notamment les universités et écoles) pourraient décrier le dispositif de la validation des acquis de l’expérience arguant également de la dévalorisation des diplômes qu’ils délivrent. Au-delà, il y a tous ces acteurs – doutant encore de la VAE ou n’y adhérant malheureusement toujours pas – qui auraient un nouvel argument pour l’attaquer comme ils le font déjà et plutôt à tort. Un autre effet pervers : le taux de validations partielles et nulles pourrait augmenter. Deux raisons plausibles. Premièrement, la loi devrait augmenter le recours à la VAE. D’où un marché qui – dans la continuité de la loi du 5 Mars 2014 – attirerait certainement de nouveaux accompagnateurs inexpérimentés voulant profiter de son potentiel. Deuxièmement, la réduction de la durée d’activité en rapport avec la certification visée si bien sûr cette durée représente une condition systématique de réussite d’un parcours VAE (notamment pour des certifications de premier niveau). Les accompagnateurs devraient donc intégrer ce risque – alors plus important – de validations partielles ou nulles ; l’objectif étant de le neutraliser sinon le minimiser. Des diagnostics plus poussés seraient plus que nécessaires ; une offre de formation adéquate et complétant son expérience pourrait être proposée au candidat dans cette optique. Toutefois, nous devrions être très vigilants et dénoncer toute commercialisation abusive de formations. En effet, si la formation permet d’entrer dans une logique de parcours qui nous semble très bien, des acteurs pourraient être tentés de commercialiser des heures de formation qui ne s’imposent pas et ont pourtant leurs coûts.

  • La reconnaissance de parties de certification constituant un bloc de compétences

Ce qui pourrait changer : selon le dispositif en vigueur, les parties de certification obtenues – issues alors d’une validation partielle – sont acquises pour 5 ans à compter de la notification de la décision du jury. Dans le cadre de la « Loi Travail », ces parties sont définitivement acquises ! Il y aurait donc reconnaissance et validation de blocs de compétences décrits comme « des éléments identifiés d’une certification professionnelle s’entendant comme un ensemble homogène et cohérent de compétences » [8]. La VAE serait donc composée de « modules » Ce qui permettrait à un candidat d’avancer « module » par « module », au rythme de la singularité de ses réalités, sans la pression du temps. Les certificateurs devront, dans un tel cas de figure, adapter leurs règlements (certifications du monde économique) ou textes réglementaires (ministères certificateurs). Au-delà de ces impacts juridiques, la « Loi Travail » aurait des impacts administratifs pour les organismes certificateurs ; ces derniers devant « faire évoluer progressivement leur base de données à la fois pour assurer le suivi des parcours prévu par la loi du 5 mars 2014 et intégrer le dynamisme des parcours non plus lié à une seule certification mais aux diverses possibilités de validations partielles, passerelles entre certification et diversité des modalités d’accès à la certification » [9].

Notre avis : Les certificateurs vont devoir, dans un premier temps, adapter leurs référentiels en termes de blocs de compétences. A ce sujet, la tentation d’une division des diplômes en de nombreux blocs sera forte. En effet, c’est là l’occasion de bénéficier d’une offre de formation courte « CPFisable ». La CNCP (Commission Nationale de la Certification Professionnelle), ainsi que les OPCA (Organisme Paritaire Collecteur Agréé) et OPACIF (Organisme Paritaire Agréé au titre du Congé Individuel de Formation) devront être les gardiens du temple à ce niveau. Cependant, qui peut dire quel est le bon nombre de blocs de compétences cibles pour chaque diplôme ? La réflexion sur ce sujet devrait suivre la seule logique pédagogique qui doit fournir une organisation lisible, modulaire et cohérente des diplômes.

  • L’entretien professionnel

Ce qui pourrait changer : Avec la « Loi Travail », l’employeur serait obligé d’informer le salarié sur la VAE à l’occasion de son entretien professionnel. Cette disposition a toutefois été supprimée au niveau du Sénat à travers l’amendement n°369 qui a été adopté. Au Sénat, une telle obligation « est apparue comme une lourdeur inutile ».

Notre avis : nous regrettons cette suppression. L’obligation aurait contribué à la promotion du dispositif de la validation des acquis de l’expérience qui reste assez méconnu dans de trop nombreuses entreprises.

  • Le congé de VAE

Ce qui pourrait changer : Afin de faire valider les acquis de son expérience, le salarié dispose d’un droit à un congé spécifique. La « Loi Travail » supprimerait les conditions d’ancienneté pour les salariés titulaires d’un CDD. Elle leur donnerait donc les mêmes droits qu’un salarié en CDI. Au niveau de l’Assemblée Nationale, cette disposition a été complétée à travers un allongement de la durée du congé de VAE qui – selon le dispositif en vigueur – ne peut excéder 24 heures par validation. Cet allongement s’inscrirait dans le cadre d’une convention ou d’un accord collectif et ce, en faveur des salariés qui n’ont pas atteint un niveau IV de qualification ou encore dont l’emploi est menacé par les évolutions économiques ou technologiques. Il a été approuvé au niveau du Sénat.

Notre avis : avec la suppression des conditions d’ancienneté qui devrait hausser de façon considérable le recours à la VAE, la « Loi Travail » est porteuse d’une certaine justice sociale. Dans le cadre de leurs congés de VAE, les salariés en CDD et en CDI pourraient jouir des mêmes droits et être soumis aux mêmes conditions de rémunération ; laquelle serait « alors égale au salaire qu’aurait perçu le salarié s’il était resté à son poste de travail et est versée par l’employeur qui doit ensuite être remboursé par l’OPCA » [10].

La « Loi Travail », entre impacts probables et regrets

La « Loi Travail » devrait impacter de façon significative les acteurs du monde de la VAE. « Les accompagnateurs devront renforcer leurs activités d’ingénierie des certifications, proposer des diagnostics approfondis ; ces derniers devant particulièrement s’inscrire dans une logique d’aide à la construction de parcours. Cette loi sous-entend donc un nouveau défi pour le monde de l’accompagnement. Avec plus d’une décennie d’expertise, VAE Les 2 Rives en est conscient ; sa mission étant d’accompagner chaque candidat vers un nouveau départ fondé sur sa singularité, ses attentes » ; souligne David Rivoire. Cette loi devrait aussi renforcer, donner un souffle nouveau à la VAE. « Le nombre de certifications délivrées chaque année stagne en effet depuis de nombreuses années autour de 30 000, très en-deçà du besoin potentiel de reconnaissance des compétences acquises » [11].

Toutefois, au-delà de la suppression de l’obligation d’informer le salarié sur la validation des acquis de l’expérience à l’occasion de son entretien professionnel, s’il y a bien un regret à surligner, c’est sans doute l’absence d’une disposition permettant le financement de la phase de choix du diplôme et d’obtention de la recevabilité ; cette dernière n’étant pas reconnue comme une prestation éligible au financement de la formation professionnelle et devant pourtant être inscrite dans « une véritable logique d’accompagnement » : « hormis l’information qui lui est apportée, l’accompagnement offre au candidat l’opportunité d’une vision claire et réaliste sur son projet, avec le ciblage du diplôme et du certificateur adéquats, ainsi que l’évaluation de ses chances de réussite, rendant le projet plus concret. Sa motivation et sa disponibilité sont également évaluées » [12]. Pourtant, de trop nombreux candidats – parmi ceux s’informant sur la VAE – abandonnent encore durant cette phase du fait particulièrement d’un manque de prise en charge. Voilà donc un sujet qui mérite toute l’attention du législateur s’il veut bien sûr favoriser le recours à la VAE, baisser de façon considérable les abandons lors de cette première phase, et permettre à de très nombreuses personnes de transformer leurs expériences en un diplôme.

En attendant la suite …

Au Sénat, les débats relatifs à la « Loi Travail » ont été ouverts ce 13 juin et ce pour deux semaines. Le projet de loi devrait revenir à l’Assemblée Nationale en juillet. Le Gouvernement, quant à lui, devrait encore avoir recours à l’article 49-3. A suivre donc !

Abdoul Karim KOMI
Responsable R&D
VAE Les 2 Rives

Projet de loi http://www.assemblee-nationale.fr/14/pdf/projets/pl3600.pdf

Rapport fait au nom de la Commission des Affaires Sociales http://www.senat.fr/rap/l15-661-1/l15-661-11.pdf

 

[1] L’avant-projet de loi a été présenté le 17 Février 

[2] Rapport fait au nom de la Commission des Affaires Sociales (p.402)

[3] Projet de loi (p.277)

[4] Projet de Loi (p.278)

[5] Projet de Loi (p.278)

[6] « Les périodes de formation en milieu professionnel (…) correspondent à des périodes temporaires de mise en situation en milieu professionnel au cours desquelles l’élève (…) acquiert des compétences professionnelles et met en œuvre les acquis de sa formation en vue de l’obtention d’un diplôme ou d’une certification et de favoriser son insertion professionnelle. Le stagiaire se voit confier une ou des missions conformes au projet pédagogique défini par son établissement d’enseignement et approuvées par l’organisme d’accueil. » (Article L. 124-1 du code de l’éducation).

[7] Pour connaître les niveaux de formation selon l’INSEE : http://www.insee.fr/fr/methodes/default.asp?page=definitions/niveaux-formation.htm

[8] https://www.defi-metiers.fr/breves/le-copanef-definit-la-notion-de-bloc-de-competences

[9] Projet de Loi (p.279)

[10] Rapport fait au nom de la Commission des Affaires Sociales (p.400).

[11] Projet de loi (p.279)

[12] http://leblogdelavae.com/quel-perimetre-pour-laccompagnement-vae/

Le financement du bilan de compétences

Le bilan de compétences permet de faire un constat sur votre parcours professionnel, d’analyser vos compétences, vos aptitudes et surtout vos motivations.

Le bilan de compétences peut se financer de différentes manières :

  • Le financement personnel : le bilan de compétences suppose une prise en charge intégrale par celui qui souhaite l’entreprendre, et peut s’effectuer auprès de consultants ou de cabinets de conseil spécialisés en la matière L’avantage principal de ce financement est que le candidat accède à la prestation sans le moindre délai.
  • Le financement grâce au Fongecif ou l’Opacif de votre secteur : ce financement suppose quelques conditions. En effet, le candidat qui le souhaite doit être salarié d’une entreprise en CDI, avoir 10 ans d’exercice professionnel, dont 12 mois dans l’entreprise actuelle, ou bien être salarié en CDD comptabilisant 24 mois de travail. L’inconvénient de ce financement est que le candidat doit s’attendre à un délai d’environ 60 jours pour accéder au bilan de compétences.
  • Le financement grâce à Pôle Emploi : que l’on soit demandeur d’emploi ou salarié, chacun a le droit d’accéder à un bilan de compétences via Pôle Emploi, que ce soit pour faire le point, ou même redéfinir totalement son projet professionnel.
  • Le financement grâce au plan de formation de son entreprise : chaque salarié peut bénéficier s’il le souhaite du financement intégral de son bilan de compétences ; même si celui-ci ne fait pas encore parti des formations requises dans le Compte Personnel de Formation (CPF) créé en 2015, il est bien sûr finançable par votre entreprise.

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