Les DRH ont-ils des pratiques d’un autre âge ?

Certification de coachs aux pratiques fantaisistes, méthodes de recrutement douteuses, piston…

 

Dans un ouvrage choc « DRH, le livre noir », Jean-François Amadieu, sociologue et professeur à Paris 1, dresse un réquisitoire sans appel de la profession. Un point de vue décalé pour Jean-François Sciberras, DRH de Rhodia et président de l’ANDRH (Association des DRH) qui prend le contre-pied des accusations.

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Dans un ouvrage au titre choc  » DRH, le livre noir « , paru en janvier 2013, Jean-François Amadieu, sociologue et professeur à Paris 1, dénonce les pratiques douteuses de la profession. Un regarde décalé pour Jean-François Sciberras, DRH de Rhodia et président de l’ANDRH (Association des DRH) qui prend le contre-pied des accusations… même s’il reconnaît que les pratiques des Ressources humaines doivent se professionnaliser.

 » Irrationnelle « , dotée de pratiques  » ésotériques  » et  » discriminatoires« … Dans un ouvrage choc  » DRH, le livre noir  » (1), Jean-François Amadieu, sociologue et professeur à Paris 1, dénonce les pratiques douteuses de la profession : certification de coachs aux pratiques fantaisistes; réhabilitation du  » piston « , pratiques inéquitables en matière de salaire et de carrière fondées sur des critères opaques ou encore méthodes de recrutement douteuses. Avec à la clef, des questions intrusives voire carrément illégales dans les entretiens, aggravées par le recours à la graphologie, la numérologie, l’astrologie ou encore la morphopsychologie. Soit une série d’aberrations qui gangrènent le monde du travail faisant des entreprises des lieux de discrimination, de stress et de souffrance. A tort ? A raison ? Quelles sont réellement les pratiques de recrutement des DRH ? Leurs méthodes d’évaluation ? De quoi dépendent réellement les salaires et les carrières ? Voici la réponse avec Jean-François Sciberras.

Colère, résignation… Que vous inspire la lecture du livre de Jean-François Amadieu ?

Le regard d’un observateur extérieur, a fortiori reconnu, peut être tout à fait positif pour la profession. Mais le livre me semble décalé. Il y a 20-25 ans, en effet, il visait juste. Les méthodes de recrutement ésotériques comme la graphologie étaient, en effet, utilisées. Mais la profession a changé. Ce n’est plus le cas aujourd’hui. D’ailleurs, les candidats optent davantage pour les mails plutôt que les lettres manuscrites. Quant au tarot, cette méthode relève de l’épiphénomène plutôt que d’une tendance lourde. La loi de 1992 – dont j’ai été à l’origine en tant que conseiller technique de Martine Aubry, alors ministre du Travail – a, d’ailleurs, permis de mieux encadrer les pratiques de recrutement. Avec, parmi les mesures phares, l’obligation d’informer le comité d’entreprise sur de tels usages. D’où la limitation des techniques douteuses… effectivement discutables.

Quelles sont les marges de progrès? La lutte contre les discriminations reste-elle prioritaire pour les DRH?

De nombreux progrès ont été faits. D’ailleurs, ce sujet n’existait pas il y a vingt ans. Mais comme toute profession, la fonction est perfectible. Sur la question du recrutement, il faut, en effet, se méfier des stéréotypes que nous avons tous. C’est pourquoi, il faut objectiver le recrutement en se basant sur des critères professionnels (formation, expérience …). Même si les jeunes issus de l’immigration peinent toujours à franchir le pas des entreprises. Les testings menés à ce sujet, notamment par Jean-François Amadieu, sont sans appel. A compétences égales, une candidature avec un nom aux consonances étrangères, une adresse située dans un quartier difficile sera plus souvent écartée qu’un CV portant un nom franco-français.

La piste du CV anonyme permettait justement de lutter contre ces discriminations en offrant aux jeunes la possibilité de franchir le cap du premier entretien. L’idée a malheureusement été enterrée. En revanche, les mentalités évoluent sur l’emploi des seniors. Leurs compétences sont de plus en plus reconnues et valorisées. Un signe ? Ces derniers mois, le taux d’emploi de ces salariés progresse.

Que répondez-vous face aux accusations concernant l’opacité des rémunérations ou encore de l’évaluation des salariés ?

La encore, des avancées considérables ont été faites. L’attribution de la rémunération variable des managers est, aujourd’hui, conditionnée à des critères de performance, liés aux résultats de l’entreprise. Qu’ils soient qualitatifs ou quantitatifs, collectifs ou individuels. Pour les dirigeants, les recommandations de l’Association française des entreprises privées (AFEP) et du Medef ont également permis d’apporter plus de transparence et d’éthique dans l’attribution des stocks-options et des actions gratuites.

La profession souffre-t-elle d’un déficit d’images?

L’image du DRH est liée à la conjoncture économique. A chaque crise, on note une fracture avec l’opinion. D’où la nécessité de professionnaliser nos pratiques afin d’être irréprochable. C’est aussi un gage d’attractivité pour la jeune génération.

(1) éditions du Seuil, janvier 2013.

Source: lentreprise.com 

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