Bien être au travail : 6 facteurs émotionnels
Beatriz Arantes, psychologue et chercheuse chez Steelcase, une entreprise spécialisée dans le mobilier de bureau et l’aménagement des espaces de travail, a réalisé une interview pour expliquer en quoi l’expérience émotionnelle était la clé du bien-être au travail. Beatriz nous détaille ses recherches en passant en revue les 6 facteurs émotionnels qui déterminent le bien-être au travail : la pleine conscience, l’authenticité, l’appartenance, le sens, l’optimisme et l’énergie.
1. La pleine conscience : avoir le choix du lieu de travail
« La pleine conscience vient de la philosophie et la méditation orientale. Cela signifie d’être juste attentif à l’instant présent. Les bénéfices sur la santé et la concentration sont prouvées. Ce n’est pas facile à mettre en place, notamment dans des open space où il y a des bruits de conversations et du passage. Les outils technologiques nous sollicitent aussi tout le temps et conduisent à faire du multitâche sans s’organiser. Ce que nous proposons c’est d’encourager les salariés à trouver le bon espace en fonction du travail à faire : des espaces isolés quand ils ont besoin de se concentrer et d’autres plus conviviaux quand c’est le temps du travail collaboratif ou des réunions. Avoir des espaces plus intimes permet aussi de se retirer juste un moment pour méditer, c’est un bon moyen de réduire le stress quand on se sent vulnérable ».
2. L’authenticité : travailler en cohérence avec ses valeurs
« L’authenticité est le deuxième pilier : agir en cohérence avec nos valeurs. L’entreprise est en décalage avec la tendance qui veut qu’on cherche soi-même son chemin. Les codes professionnels, – vestimentaires, ou de posture – sont encore très rigides. Le côté arbitraire de ces codes est mal compris, surtout par les jeunes générations. On a envie de plus de transparence, de pouvoir s’exprimer pour être plus créatif. Demander du formalisme empêche d’être créatif et ajoute des filtres cognitifs qui sont contraire au sentiment de bien-être. Pour se sentir à l’aise dans un environnement authentique, nous préconisons par exemple des textiles plus doux, des couleurs, des matériaux qui font nous sentir comme à la maison à l’opposé de la froideur des bureaux gris et métalliques. Au niveau de l’ergonomie, on va proposer différentes postures corporelles pour pouvoir travailler debout ».
3. Le sentiment d’appartenance encourage l’engagement
« Le sentiment d’appartenance est aussi fondamental. C’est le besoin de sentir soutenu, de créer des liens avec les autres. Avoir l’impression de faire partie d’un groupe, de cultiver des relations d’amitié au travail contribue à encourager l’implication des salariés et leur attachement à l’entreprise. L’environnement de travail doit faciliter ces liens avec des lieux et des moments de sociabilisation, où des interactions spontanées peuvent se créer. L’entreprise doit aussi investir dans des technologies, notamment visuelles, pour encourager la convivialité ».
4. Donner du sens au travail
« Les salariés ont besoin de sentir qu’ils contribuent à quelque chose de plus grand. Le sens est un facteur de satisfaction énorme. Des chercheurs de la Havard University ont d’ailleurs montré que ce qui est le plus déterminant pour notre moral à la fin de la journée, c’est le sentiment d’avoir avancé dans notre travail et d’avoir changé la vie de quelqu’un d’autre. Cela signifie que le travail d’un manager c’est de soutenir ses collaborateurs pour leur permettre d’avancer. Au niveau de l’espace de travail, ils doivent donc avoir toutes ressources à leur disposition.
La « clean desk policy », doit être questionnée : le fait de nettoyer son bureau chaque soir avant de partir pour que tout soit propre. Ça laisse un lieu de travail propre et lisse mais gomme aussi l’impression d’avoir avancé. C’est important dans une entreprise où le travail est distribué d’afficher l’avancement du travail ».
5. L’optimisme doit être cultivé en entreprise
« L’optimisme, a un rôle à jouer dans le contexte actuel. C’est important de retrouver ce sentiment de croyance dans notre propre capacité d’agir. Il s’agit de garder l’esprit ouvert, rechercher ce qui est bon. C’est une émotion à cultiver en entreprise pour rester motivé. L’optimisme est également bon pour la santé, pour le système immunitaire. La clé pour inciter à l’optimisme c’est de donner aux employés la possibilité de choisir où ils vont travailler. De pouvoir s’échapper d’un open space par exemple pour éviter qu’ils se sentent impuissants dans un bureau bruyant qu’ils ne peuvent pas quitter quand ils veulent ».
6. L’énergie est vitale pour se sentir bien au travail
« L’énergie c’est se sentir plein de vitalité. Que peut-on faire pour que les gens se sentent bien au travail ? On sait qu’il faut manger correctement, faire du sport, se reposer mais en entreprise on ne l’encourage pas finalement. La seule activité c’est de bosser le plus possible alors qu’utiliser le corps pour respecter les rythmes est beaucoup plus bénéfique. Cela passe par la possibilité de se reposer au travail à un moment de la journée, faire une sieste par exemple. Rester assis toute la journée est très mauvais. La posture assise augmente le risque de mortalité. Au niveau mental on a besoin de bouger aussi pour apprendre et être créatif. Ce qu’on préconise c’est d’avoir des zones de travail différentes ou de travailler debout avec un bureau ajustable en hauteur. La clé c’est de de ne pas rester dans la même position tout au long de la journée ».